Explications
Plaidoyer pour une politique d'aide au développement désintoxiquée
- Si l'aide au développement avait atteint ses objectifs, nous discuterions aujourd'hui de la manière de la supprimer. Mais c'est le contraire qui se produit : elle doit être augmentée. On réclame même un plan Marshall pour l'Afrique.
- Malgré la déception légitime que suscite l'absence de succès durables en matière de développement, il ne faut pas oublier que des progrès ont été réalisés dans certains domaines (santé, éducation, participation démocratique, promotion des femmes, informatique et communication). Certaines ONG, fondations politiques et services de développement des églises, entre autres, ont joué un rôle déterminant dans ce processus.
- Cependant, la pauvreté des gens se maintient à un niveau élevé depuis des années (environ 50% de la population). Les Etats implosent ; les conflits ethniques et culturels gagnent en intensité en de nombreux endroits. Toutes les tentatives visant à endiguer la corruption étatique - le principal fléau de l'Afrique - se sont jusqu'à présent révélées largement inefficaces. La souveraineté de l'Etat est mal comprise et utilisée de manière abusive comme une licence pour tricher et opprimer.
- Les pays industrialisés du Nord sont coresponsables de cette misère : l'aide au développement s'est révélée être une drogue dont les consommateurs gâtés ne peuvent se passer. Comme l'utilisation convenue du transfert financier ne peut pas être contrôlée (par exemple par le parlement et la justice des pays bénéficiaires), elle renforce les agissements illégaux, parfois criminels, de gouvernements à la légitimité démocratique faible, qui sont plus intéressés par l'auto-privilège que par une politique de développement efficace au profit de leur population. Cette complicité entre des directions d'État parasitaires et des organisations donatrices occidentales n'est pas défendable sur le plan éthique : l'argent des impôts des citoyens est brûlé ! Le développement ne peut venir que de l'intérieur.
- C'est pourquoi nous demandons une désintoxication des pratiques courantes de la coopération au développement (CD) et un retour à l'objectif premier de l'aide au développement : encourager les personnes vivant dans les pays pauvres à activer leur potentiel de développement pour une "vie bonne", c'est-à-dire les aider à surmonter les obstacles sur la voie d'une vie autodéterminée grâce à leurs propres revenus du travail.
- Les efforts visant à comprendre et à concilier les différences socioculturelles devraient à nouveau être menés avec beaucoup plus de sérieux.
- Toutes les pratiques dans les relations commerciales et économiques avec les pays africains qui ont un effet fatal de "tueurs d'emplois", en particulier les pratiques de distorsion de concurrence des politiques agricoles et de pêche des Etats de l'UE (subventions à la production), devraient être abandonnées. Il faut commencer par les systèmes de production qui sont particulièrement dommageables pour l'Afrique.
- Il faut mettre fin aux mauvaises incitations dans le domaine de l'éducation (fuite des cerveaux). Au lieu de cela, il est recommandé de mettre davantage l'accent sur la formation professionnelle initiale et continue, en intégrant des technologies adaptées aux conditions locales. Il faudrait en particulier promouvoir l'enseignement des disciplines STEM, l'apprentissage en ligne et les bourses "sur place", ainsi que l'équipement des universités par le biais d'un renforcement durable des institutions.
- La coopération avec la diaspora africaine, parfois très active, doit être encouragée. Il serait par exemple judicieux de proposer des incitations et des aides pour permettre au personnel spécialisé exerçant en Europe de rentrer dans son pays d'origine.
- Les destinataires de l'aide au développement ne devraient pas être uniquement les gouvernements des pays en développement, mais aussi des institutions qui élargissent le spectre social des bénéficiaires de l'aide : des organisations non gouvernementales sélectionnées et des éléments entreprenants des classes moyennes, qui sont jusqu'à présent étouffés par un Etat patronal parasitaire. Pour les gouvernements qui ne respectent pas les normes convenues de la coopération au développement (catalogue de critères de la coopération au développement) au détriment de leurs populations, les transferts de la coopération au développement devraient être annulés, et dans les cas flagrants de corruption, pour la durée du mandat du président en exercice. Les "aides budgétaires" incontrôlées devraient être supprimées plus systématiquement que par le passé. Nous nous opposons à la tendance actuelle qui consiste à rétablir l'aide au développement pour des raisons de politique étrangère, dans des pays qui n'entrent pas en ligne de compte en raison de violations des droits de l'homme.
- Il faudrait en revanche mettre davantage de moyens à disposition pour des priorités ayant un effet durable sur le potentiel de développement de la population active. Il est urgent de soutenir davantage les programmes de planification familiale afin de limiter la forte croissance démographique qui réduit à néant les progrès socio-économiques.
- Il est nécessaire de soutenir davantage les microcrédits accordés aux groupes de femmes selon les critères de la Grameen Bank.
- Il est nécessaire de soutenir davantage l'économie allemande de taille moyenne en recourant davantage au capital-risque.
- Dans le cadre de toutes les mesures d'aide, il convient d'exiger une coordination ciblée des pays donateurs entre eux afin d'améliorer la cohérence.
Cologne, le 27 novembre 2011.2016